RÉACTIONS DANS LA PRESSE SPÉCIALISÉE

ALERTE DE FRANCOIS CHASLIN AUX CONFRERES JOURNALISTES ET ARCHITECTES PAR EMAIL

De : François Chaslin [mailto:chaslin@orange.fr]
Envoyé : vendredi 24 février 2012 17:13
À : Métropolitains
Objet : Alerte, une grave dégradation du musée de l'Arles antique

Chers amis, chers confrères

Une atteinte majeure à l'une des œuvres emblématiques de l'architecture française des années quatre-vingt dix, l'un des grands projets de province du premier septennat de Mitterrand, est en train d'être commise. Il s'agit du Musée de l'Arles antique de l'architecte Henri Ciriani, conçu en 1983, inauguré en mars 1995, bâtiment auquel on a décidé d'ajouter une extension pour la présentation d'un chaland antique. Ceci sans associer ni semble-t-il même consulter son auteur. L'atelier de maîtrise d'œuvre du département s'est chargé de l'affaire et il a déjà commencé à taper dans l'un des angles du musée, comme en attestent les photos du "chantier" qui me sont parvenues.


 Cet angle, l'angle Nord, constitue le côté droit de la grande façade principale. Il s'ouvre en une sorte de patio de grande hauteur, marqué par des jeux de poteaux ronds et de poutres de béton armé, en contraste avec l'Emalit (verre laqué) d'un bleu soutenu, vitré du côté du musée et ouvrant sur le fleuve par une très longue et magnifique "fenêtre".
Cet édifice avait été dessiné selon une figure géométrique assez rare, en triangle, ou plus exactement en triangle "en hélice", dont les ailes débordent, ce qui donne à chacun de ses angles un statut très particulier, et à vrai dire essentiel. Il a été finaliste (shortlisted) du prix européen Mies van der Rohe en 1996, année où c'est d'ailleurs un autre bâtiment français qui devait l'emporter, la Bibliothèque de France de Perrault.

Cette question soulève de nombreux points : de propriété artistique, de respect du patrimoine contemporain, de compétence et de légitimité de ces services départementaux de maîtrise d'œuvre. Casserait-on un angle de la villa Savoye pour y greffer un garage? Il y a là un rare cas d'école dont vous devriez vous saisir.

Je vous joins cinq documents re-photographiés avec mon téléphone dans la monographie qui était parue chez Fidia à Lugano, en 2000, sous la direction de Jean Petit. Le dessin perspectif est de l'architecte, les photographies sont (si je ne me trompe) de Pino Musi. Les deux vues ARL 01 et ARL 02 (Entrée, façade principale, et Angle façade sur Rhône, le secteur démoli) sont de Jean-Marie Monthiers. Les deux photos ARL03 et 04 (Angle musée de façade sur Rhône, avec la partie démolie au milieu, et Façade sur Rhône) sont de Marcela Espejo.

Bien à vous.

François Chaslin







France Culture, Métropolitains
L'émission est cette année diffusée le dimanche de 16h00 à 17h00.

Elle est écoutable durant un mois et téléchargeable durant une semaine sur le site 
www.franceculture.com
.



PUBLICATION DANS LE SITE WEB DE ARCHICOOL WEBZINE LE 26 FEVRIER 2012

"Altération et possible contrefaçon d'une oeuvre majeure de l'architecte Henri Ciriani à Arles" 





LETTRE DE LA REDACTION DE LA REVUE UME (AUSTRALIE) A FRANÇOIS CHASLIN PAR EMAIL
De : Jackie Cooper [mailto:ume@umemagazine.com]
Envoyé : lundi 27 février 2012 04:24
À : chaslin
Cc : MEspejoC
Objet : une grave dégradation du musée de l'Arles antique



France Culture, Metropolitains





Dear Francois Chaslin


We are shocked to hear that the integrity of the Musee d'Arles is under threat from work undertaken without the collaboration of the architect. The museum is a significant building in the canon of modern French architecture. No changes should be made to the building without recourse to the original designer.

This matter concerns the fundamental principle of intellectual property rights. 

In Australia, a major refurbishment to the National Gallery of Australia in Canberra was announced without reference to Col Madigan, architect of the building. The misguided attempt to alter the building without consulting Mr Madigan outraged leading Australian architects who saw this as an issue of an architect's moral rights. 

In the case of the Musee d'Arles designed by Henri Ciriani, we deplore the commencement of works without the architect's involvement. As architectural editors and publishers, we are well situated to appreciate the place and significance of the oeuvre of Ciriani in the modern international context, and also the significance of this building within his body of work. 

We hope and trust that the custodians of the museum will immediately halt works and consult M Ciriani about amending his original design.

Yours sincerely

Haig Beck and Jackie Cooper
Editors and publishers
UME
PO Box 190
Point Lookout, QLD 4183 Australia
+61 7 3409 8944




PUBLICATION DANS LE SITE WEB DU MONITEUR DES TRAVAUX PUBLICS ET DU BATIMENT LE 28 FEVRIER 2012

"Une oeuvre majeure d'Henri Ciriani gravement endommagée" 



EDITORIAL DE GWENAËL QUERRIEN LE 30 MARS 2012 DANS ARCHISCOPIE N°112 AVRIL 2012


L'architecture est-elle (encore) un art? - La question est posée lorsque l'oeuvre construite n'est plus considérée comme relevant du droit d'auteur (droit moral) de l'architecte, ce qu'illustre le projet d'extension du musée Arles antique aujourd'hui en chantier 1.
Conçu en 1983 par Henri Ciriani, figure majeure de l'architecture du dernier XXe siècle en France, et achevé en 1995, ce musée a été salué par la critique dans plus de dix pays aux quatre coins du monde 2.
Aujourd'hui en charge du musée, le département des Bouches-du-Rhône a confié un projet d'extension à un architecte de ses services techniques, semble-t-il sans en avertir Ciriani, convié à la pose de la première pierre. Jean-François Hérelle, l'architecte de l'extension, malgré son intention de "conserver le registre formel et les matériaux voulus par Henri Ciriani", casse la dynamique de la géométrie triangulaire du musée, édifice solaire reconnaissable entre tous par sa couleur bleu et par le jeu entre pleins et vides qui ancre l'édifice dans le paysage. Le projet d'extension perd ce caractère en colmatant l'angle de la façade d'entrée côté Rhône.
Transformer un édifice sans consulter l'architecte-auteur est aujourd'hui banal et questionne le statut de l'architecture. Si son appartenance aux "beaux-arts", au même titre que la peinture et la sculpture, a longtemps été une évidence, comme en témoignait l'ancienne école éponyme, sa dimension artistique est aujourd'hui beaucoup moins claire. Son statut est complexe parce que ses acteurs sont multiples, mais aussi parce que, contrairement à la peinture ou la sculpture, elle es indéplaçable et a une valeur d'usage qui peut justifier sa transformation, voire sa destruction, par le propriétaire, pour diverses raisons (isolation, sécurité, extension...). Il en résulte un certain flou sur l'exercice du droit d'auteur de l'architecte.
Celui-ci (ou son ayant droit) devrait en principe être consulté avant toute modification dûment justifiée d'une "œuvre originale".  On sait que, de tout temps, la pratique d'extension ou de transformation des bâtiments a été chose courante, y compris pour les châteaux et autres monuments, les adjonctions se faisant au fil des siècles et conférant à l'édifice une épaisseur historique. Mais aujourd'hui tout s'accélère. Rénovations et extensions se succèdent au fil des décennies et non plus des siècles, et le droit moral de l'architecte est souvant bafoué d'où la multiplication des procès. Sans doute manque-t-on de recul pour apprécier l'architecture contemporaine: raison de plus pour la respecter autant que le chaland d'époque romaine, découvert dans le Rhône en 2010, que l'extension du musée d'Arles abritera après une méticuleuse restauration. 
"À quoi sert en effet de commander des projets originaux à des architectes si c'est pour les défigurer peu de temps après?" 3
Gwenaël Querrien
1 - Surface initiale du musée 7661m2. SHON; extension environ 700 m2 pour un coût de 6 M€. Cf. le projet in dossier de presse "Exposition Arles-Rhône 3' sur <www.arles-antique.cg13.fr>  Cf. aussi, sur <henriciriani.blogspot.fr/>, photos et documents, dont une alerte de François Chaslin à la presse, une lettre d'Henri Ciriani, des lettres de confrères...
2 - Cf. entre autres, Caroline Varlet, Bulletin d'informations architecturales, n°189, déc.1995, IFA.
3 - Cf. interview d'Agnès Tricoire, avocate au barreau de Paris spécialiste de la propriété intellectuelle, par Jacques-Franck Degioanni, lemoniteur.fr du21/7/2008.


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